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PÊCHERS.

depuis quinze ans, qui produisit une pêche lisse entre deux vraies pêches ; un arbre à fruits lisses croissait dans le voisinage.

En 1844[1] un pêcher variété « Vanguard » donna parmi ses fruits ordinaires une seule pêche lisse Romaine rouge.

M. Calver[2] a planté aux États-Unis un pêcher provenant de semis, qui donna comme produit un mélange de pêches proprement dites et de pêches lisses.

Près de Dorking[3], une branche de la variété de pêcher « Téton de Vénus, » qui se reproduit exactement de graine[4], porta, outre son fruit si particulier par sa forme, une pêche lisse un peu plus petite, mais tout à fait ronde et bien conformée.

À tous ces cas relatifs à des pêchers produisant subitement des pêches lisses, ajoutons encore le cas unique qui s’est présenté à Carclew[5], d’un pêcher lisse provenant de semis, planté vingt ans auparavant, et qui, sans avoir jamais été greffé, produisit un fruit moitié pêche et moitié pêche lisse, et ultérieurement une pêche parfaite.

Pour résumer les faits qui précèdent ; nous avons des preuves nombreuses, — que les noyaux de pêche produisent des pêchers lisses, et que les noyaux de ces derniers peuvent produire de vrais pêchers, — qu’un même arbre peut porter de vraies pêches et des pêches lisses, — que les pêchers produisent par variation de bourgeons et brusquement, des pêches lisses (celles-ci se reproduisant par leur graine), et même des fruits mixtes, étant partiellement pêches et partiellement pêches lisses, et qu’enfin un pêcher lisse, après avoir donné des fruits mixtes, finit par donner de vraies pêches. La pêche proprement dite ayant existé avant la pêche lisse, on devait s’attendre à ce qu’en vertu du principe du retour, les pêchers lisses donnassent naissance par variation de bourgeons ou par graine à de vraies pêches, plus souvent que les pêchers ordinaires à des pêches lisses ; cela n’est pourtant point le cas.

On a proposé deux explications pour rendre compte de ces conversions. La première est que, dans tous les cas, les arbres parents ont dû être des hybrides[6] du pêcher proprement dit et du pêcher lisse, et sont revenus à une de leurs formes parentes pures, soit par variation de bourgeons, soit par graine. Cette manière de voir n’est pas en elle-même improbable ; car la pêche « Mountaineer » que Knight a produite en fécondant la fleur du pêcher muscade rouge, par le pollen de la pêche brugnon violette hâtive[7], donne des pêches, mais qui se rapprochent quelquefois par le goût et la nature de leur surface unie, des pêches lisses. Nous remarquons que dans les faits que nous avons rapportés plus haut, pas moins de six variétés connues de pêches et plusieurs autres sans nom, ont produit tout à coup

  1. Gardener’s Chronicle, 1844, p. 589.
  2. Phytologist, vol. IV, p. 299.
  3. Gardener’s Chronicle, 1856, p. 531.
  4. Godron, O. C., t. II, p. 97.
  5. Gardener’s Chronicle, 1856, p. 531.
  6. Alph. de Candolle, O. C., p. 886.
  7. Thompson, dans Loudon’s Encyclop. of Gardening, p. 911.