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FRUITS.

et nous concernent, ce sont, les C. maxima et pepo, qui comprennent tous les potirons, courges, etc. ; et le C. moschata, ou melon d’eau. Ces trois espèces sont inconnues à l’état sauvage, mais Asa Gray[1] donne d’excellentes raisons qui permettent de supposer que quelques courges sont originaires de l’Amérique du Nord.

Les trois espèces que nous venons d’énumérer sont très-voisines et ont le même facies général, mais on peut, d’après Naudin, toujours distinguer leurs innombrables variétés par certains caractères presque fixes, et ce qui est plus important, par leurs croisements, qui ne donnent pas de graines, ou des graines stériles ; tandis que leurs variétés se croisent réciproquement et spontanément avec la plus grande facilité. Naudin (page 15) remarque que, bien que ces trois espèces aient considérablement varié dans beaucoup de caractères, elles l’ont fait d’une manière assez analogue, pour qu’on puisse ranger leurs variétés suivant des séries à peu près parallèles, comme nous l’avons déjà vu dans le froment, les deux classes principales des pêches, et dans quelques autres cas. Quoique quelques variétés aient des caractères inconstants, il en est d’autres qui, cultivées à part et maintenues dans des conditions extérieures uniformes, sont, suivant les propres paroles de Naudin, « douées d’une stabilité presque comparable à celle des espèces les mieux caractérisées. » Une d’elles l’Orangin (p. 43, 63), a la propriété de transmettre ses caractères propres avec une énergie telle que, lorsqu’on la croise avec d’autres variétés, la grande majorité des métis reproduisent son type. À propos du C. pepo, Naudin (p. 47) dit que ses races « ne diffèrent des espèces véritables qu’en ce qu’elles peuvent s’allier les unes aux autres par voie d’hybridité, sans que leur descendance perde la faculté de se perpétuer. » Si, laissant de côté l’épreuve de la stérilité, on s’en rapportait aux seules différences extérieures, on pourrait établir, aux dépens des variétés de ces trois espèces de Cucurbita, une foule d’autres espèces. Beaucoup de naturalistes actuels négligent trop, à mon avis, ce critérium de la stérilité : il n’est cependant pas improbable qu’après une culture prolongée et les variations qui en sont la suite, la stérilité réciproque d’espèces végétales bien distinctes ait pu diminuer, comme cela paraît avoir été le cas chez plusieurs animaux domestiques. Nous ne serions pas non plus justifiés à affirmer que, dans les plantes cultivées, les variétés ne puissent jamais acquérir un faible degré de stérilité, comme nous le verrons par la suite, à propos de quelques faits signalés par Gärtner et Kölreuter[2].

Naudin a groupé sous sept sections les diverses formes de C. pepo, chacune comprenant des variétés qui leur sont subordonnées. Il regarde cette plante comme peut-être de toutes la plus variable. Les fruits de l’une des variétés (p. 33, 46), peuvent acquérir un volume deux mille fois plus grand que ceux d’une autre. Lorsqu’ils atteignent de grandes dimensions, ils sont peu nombreux (p. 47), et inversement, ils sont abondants quand ils sont

  1. American Journ. of Science, (2e  série), vol. XXIV, 1857, p. 442.
  2. Gärtner, Bastarderzeugung, 1849, p. 87 ; — p. 169, pour le maïs ; — p. 92 et 181, pour le verbascum. — Voir aussi son Kenntniss der Befruchtung, p. 137. — Pour la nicotiane, voir Kölreuter, Zweite Fortsetz., 1764, p. 53, quoique le cas soit un peu différent.