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Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 1, 1868.pdf/406

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FLEURS.

apparaît, comme qu’il soit produit, M. Rivers (p. 4) dit qu’elle peut devenir la souche d’un type nouveau, si elle donne de la graine. Quelques formes ont une tendance si prononcée à la variation (p. 16), que, plantées dans des sols différents, elles présentent des couleurs assez diverses pour qu’on les prenne pour des formes distinctes. Le nombre des formes de roses est immense, et M. Desportes dans son Catalogue pour 1829, en énumère 2562 cultivées en France ; mais il est probable qu’un grand nombre d’entre elles ne sont que nominales.

Ne voulant point détailler ici les divers points sur lesquels portent les différences entre toutes les variétés, je me contenterai de mentionner quelques particularités constitutionnelles. Plusieurs roses françaises ne réussissent pas en Angleterre (Rivers, p. 12), et un horticulteur[1] a remarqué que souvent, dans un même jardin, on voit une rose, qui ne donne rien contre un mur tourné au midi, réussir contre un mur tourné au nord. C’est le cas ici pour la variété Paul-Joseph. Elle croît vigoureusement et fleurit supérieurement près d’un mur exposé au nord, et sept rosiers situés derrière un mur au midi n’ont rien produit pendant trois ans. Il est des roses qu’on peut forcer, tandis que c’est impossible pour d’autres ; dans le nombre se trouve la variété « Général Jacqueminot[2]. » M. Rivers prévoit avec enthousiasme que, par les effets du croisement et de la variation (p. 87), le jour viendra où toutes nos roses auront un feuillage toujours vert, des fleurs éclatantes et parfumées, et fleuriront de juin en novembre : prévision éloignée, il semble ; mais la persévérance du jardinier peut faire des merveilles, car certes elle en a déjà fait.

Il ne sera pas inutile de donner ici un rapide aperçu de l’histoire bien connue d’une classe de roses. Quelques roses d’Écosse sauvages (R. spinosissima) furent, en 1793, transplantées dans un jardin[3] ; l’une d’elles portait des fleurs faiblement teintées de rouge, et donna de graine une plante à fleurs demi-monstrueuses, aussi teintées de rouge ; les produits de sa graine furent demi-doubles, et, grâce à une sélection continue, au bout d’une dizaine d’années, elle avait donné naissance à huit sous-variétés. Dans le cours de moins de vingt ans, ces roses doubles d’Écosse avaient tellement varié et augmenté de nombre, que M. Sabine a pu en décrire vingt-six variétés bien marquées, groupées dans huit sections. En 1841[4] on pouvait s’en procurer dans les pépinières près de Glasgow, trois cents variétés, rouges, écarlates, pourpres, marbrées, bicolores, blanches et jaunes, et différant beaucoup par la grosseur et la forme de la fleur.

Pensées (Viola tricolor, etc.). L’histoire de cette fleur paraît être assez bien connue ; elle a été cultivée, en 1687, dans le jardin d’Evelyn, mais on n’est occupé de ses variétés que depuis 1810–1812, époque à laquelle lady Monke s’adonna à leur culture avec le concours d’un horticulteur très-connu, M. Lee, et au bout de quelques années, il en existait déjà une

  1. Rev. W. F. Radclyffe, Journ. of Hort., 14 mars 1865, p. 207.
  2. Gard. Chronicle, 1861, p. 46.
  3. M. Sabine, Trans. Hort. Soc., vol. IV, p. 285.
  4. Encyclop. of Plants, by J. C. Loudon, 1841, p. 443.