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HÉRÉDITÉ.

jours en remuant les doigts. Cet enfant, devenu vieillard, avait encore de la peine à se contenir pour ne pas faire ces mêmes gestes ridicules, quand il éprouvait une vive satisfaction. Il eut huit enfants, dont une petite fille, qui, à l’âge de quatre ans, remuait les doigts de la même manière, et, lorsqu’elle était excitée, levait ses mains en agitant ses doigts exactement comme l’avait fait son père. Je n’ai jamais entendu parler d’un pareil tic chez d’autres personnes et, dans le cas qui précède, il n’y avait certainement pas eu imitation de la part de l’enfant.

Quelques auteurs ont contesté que les attributions mentales complexes, dont dépendent le génie et le talent, fussent héréditaires, même dans le cas où les deux parents en sont doués ; mais M. Galton a traité cette question de l’hérédité du talent, d’une manière remarquable et tout à fait convaincante[1].

Il importe malheureusement peu, en ce qui regarde l’hérédité, qu’une qualité ou une conformation soit nuisible, dès qu’elle n’est point incompatible avec la vie ; les ouvrages sur l’hérédité des maladies, ne laissent à cet égard aucun doute[2]. Les anciens l’avaient déjà constaté, car omnes Græci, Arabes et Latini in eo consentiunt, dit Ranchin. On pourrait dresser un long catalogue de toutes les déformations ou prédispositions à diverses maladies qu’on a reconnues héréditaires. D’après le Dr Garrod, 50 pour 100 des cas de goutte observés dans la pratique des hôpitaux sont héréditaires, et dans la pratique particulière, la proportion est encore plus forte. On sait combien l’aliénation mentale frappe souvent certaines familles, M. Sedgwick en cite quelques cas terribles ; entre autres celui d’un chirurgien dont le père, le frère et quatre oncles paternels furent tous aliénés ; d’un juif, dont le père, la mère et six frères et sœurs furent atteints d’aliénation mentale ; et encore d’autres cas de familles, dont plusieurs membres se sont sui-

  1. Macmillan’s Magazine, juillet et août 1865.
  2. Dr P. Lucas, Traité de l’Hérédité naturelle, 1847. — M. W. Sedgwick, British and Foreign Medic. Chirurg. Review, avril et juillet 1861, et 1863, citation du Dr Garrod sur la goutte. — Sir H. Holland, Medical notes and reflections, 3e édit., 1855. — Piorry, de l’Hérédité dans les maladies, 1840. — Adams, Philos. Treatise on hereditary peculiarities, 2e édit., 1815. — Dr J. Steinan, Essay on hereditary diseases, 1843. — Paget, Medical Times, 1857. p. 192, sur l’hérédité du cancer. — Dr Gould, Proc. of American Acad. of sciences, nov., 8, 1853, donne un cas fort curieux d’une hémorrhagie héréditaire pendant quatre générations. — Harlan, Medical Researches, p. 593.