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Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/13

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HÉRÉDITÉ.

tions, quelques membres avaient toujours eu sur la tête une mèche d’une couleur différente du reste de la chevelure. J’ai connu un Irlandais, qui avait, du côté droit, et parmi des cheveux foncés, une petite mèche blanche ; sa grand’mère en avait eu une pareille du même côté, et sa mère, du côté opposé. Il me paraît inutile d’insister là-dessus et de citer d’autres exemples, car des faits de ressemblances entre parents et enfants sont connus de tous, et se manifestent à propos des moindres détails. De quelles combinaisons multiples de conformation corporelle, de dispositions mentales et d’habitudes, l’écriture ne doit-elle pas dépendre ! et cependant, ne voit-on pas souvent une grande ressemblance entre les écritures du fils et du père, bien que ce dernier ne l’ait pas enseignée au premier ? Hofacker a, en Allemagne, remarqué l’hérédité de l’écriture ; et on a constaté que les jeunes Anglais apprenant à écrire en France ont une tendance marquée à conserver la manière anglaise[1]. Les gestes, la voix, la démarche, le maintien sont héréditaires ainsi que l’ont montré l’illustre Hunter et Sir A. Carlisle[2]. Parmi quelques exemples frappants qui m’ont été donnés par mon père, je citerai celui d’un homme qui était mort pendant l’enfance de son fils ; mon père qui ne connut ce dernier que beaucoup plus tard, maladif et déjà d’un certain âge, crut revoir son ancien ami avec toutes ses habitudes et ses manières particulières. Certaines habitudes deviennent des tics, dont l’hérédité a souvent été observée ; on a souvent cité le cas d’un père qui avait l’habitude de dormir sur le dos, avec la jambe droite croisée sur la gauche, et dont la fille au berceau faisait exactement de même[3]. Je signalerai le cas suivant que j’ai moi-même observé sur un enfant, et qui est curieux comme tic associé à un état mental particulier, celui d’une émotion agréable. Lorsque cet enfant était content, il avait la singulière habitude de remuer rapidement ses doigts parallèlement les uns aux autres et, quand il était très-excité, il levait les deux mains de chaque côté de sa figure, et à hauteur des yeux, tou-

  1. Hofacker, Ueber die Eigenschatften, etc., I, 1828, p. 34. — Rapport de Pariset dans Comptes rendus, 1847, p. 592.
  2. Hunter, dans Harlan’s Med. Researches, p. 530. — Sir A. Carlisle, Phil. Transact., 1814, p. 94.
  3. Girou de Buzareingues, de la Génération, p. 282.