Aller au contenu

Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/265

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
258
SÉLECTION.

autant qu’il l’était il y a un siècle. » On a déjà plusieurs fois dit que le terme de la dernière perfection avait été atteint pour nos fleurs, et toujours on est parvenu plus haut encore. Il est peu de fruits qui aient été plus améliorés que la fraise, et cependant un auteur compétent sur le sujet[1] croit que nous sommes encore loin des limites extrêmes auxquelles on peut arriver.

Le temps est un élément essentiel pour la formation de nos races domestiques, en ce qu’il permet la naissance d’individus innombrables, que des conditions diversifiées rendent variables. La sélection méthodique a été parfois pratiquée dès une époque reculée jusqu’à nos jours, même par des peuples à demi civilisés, et a dû, dans les temps anciens, produire quelques résultats. La sélection inconsciente doit avoir été encore plus efficace, car pendant de longues périodes, les individus ayant le plus de valeur ont dû être conservés, et les moins estimés négligés. Dans le cours des temps, les diverses variétés auront aussi, surtout dans les pays les moins civilisés, été modifiées par la sélection naturelle. On croit généralement, bien que nous n’en ayons que peu ou point de preuves, que les caractères nouveaux se sont fixés avec le temps, et qu’après être restés longtemps fixes ils ont pu redevenir variables sous l’influence de nouvelles conditions.

Nous commençons vaguement à entrevoir le laps de temps qui s’est écoulé depuis que l’homme a commencé à domestiquer les animaux et à cultiver les plantes. Dans la période néolithique, pendant laquelle les habitations lacustres de la Suisse étaient habitées, quelques animaux étaient déjà domestiqués et quelques plantes cultivées. À en juger par ce que nous savons des habitudes des sauvages, il est probable que l’homme de la première période de la pierre, — alors qu’il existait beaucoup de grands mammifères actuellement éteints, et que la configuration du pays était bien différente de ce qu’elle est aujourd’hui, — possédait au moins quelques animaux domestiqués, quoiqu’on n’en ait pas encore découvert les restes. Si on peut se fier à la linguistique, on connaissait l’art de labourer et de semer les terres, et les principaux ani-

  1. M. J. de Jonghe, Gardener’s Chronicle, 1858, p. 173.