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Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/328

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EFFETS DE L’USAGE ET DU DÉFAUT D’USAGE.

H. Smith[1] constate que dans les anciennes représentations du chien, à l’exception d’un seul cas égyptien, aucune sculpture de l’ancienne ère grecque n’a figuré de chien à oreilles complétement pendantes ; des chiens à oreilles à demi pendantes manquent dans les monuments les plus anciens, tandis que ce caractère augmente graduellement dans les ouvrages de l’époque romaine, Godron[2] a aussi remarqué que les porcs des anciens Égyptiens n’avaient pas les oreilles tombantes. Il est remarquable que cette chute des oreilles, bien que probablement un effet de défaut d’usage, n’entraîne nullement à une diminution de leur grosseur ; bien au contraire, avoir des animaux aussi différents que le sont nos lapins de fantaisie, quelques races indiennes de la chèvre, nos épagneuls, limiers et autres chiens, ayant tous des oreilles très-allongées, il semblerait que le défaut d’usage aurait réellement déterminé une augmentation considérable de ces organes, qui chez les lapins a même été jusqu’à affecter la conformation du crâne.

M. Blyth m’a fait remarquer que chez aucun animal sauvage la queue n’est enroulée ; tandis que les porcs et quelques races de chiens présentent ce caractère à un haut degré. Cette particularité paraît donc bien être un résultat de la domestication ; mais sans que nous puissions affirmer qu’elle soit aucunement en relation avec une diminution de l’usage de la queue.

Un travail pénible, comme on le sait, épaissit promptement l’épiderme des mains. Dans une localité de Ceylan, les genoux des moutons sont recouverts de callosités cornées, qui proviennent de l’habitude qu’ils ont de s’agenouiller pour brouter les herbages courts, et qui distinguent les troupeaux de Jaffna de ceux des autres parties de l’île ; mais on n’a pas indiqué si cette particularité était héréditaire[3].

La membrane muqueuse qui tapisse l’estomac est en continuité avec la peau extérieure du corps ; il n’est donc pas étonnant que sa texture puisse être affectée par le genre de nourriture consommée ; et puisse aussi présenter d’autres modifications intéressantes. Hunter a observé, il y a déjà fort long-

  1. Naturalist’s Library, Dogs, vol. II, 1840, p. 104.
  2. Godron, de l’Espèce, t. I, 1859, p. 367.
  3. Ceylan, par Sir J. E. Tennent, 1859, vol. II, p. 531.