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258 Objections diverses.  

le long de certaines lignes de son corps pour ne pas salir sa coquille. Mais il n’y a pas de doute que, tout en servant à enlever les ordures, ils ne remplissent d’autres fonctions, dont l’une paraît avoir la défense pour objet.

Comme dans plusieurs occasions précédentes, M. Mivart demande au sujet de ces organes : « Quelle a pu être l’utilité des premiers rudiments de ces conformations, et comment les bourgeons naissants ont-ils pu préserver la vie d’un seul Echinus ? » il ajoute : « Même un développement subit de la faculté de saisir n’aurait pu être utile sans la tige mobile, ni cette dernière efficace sans l’adaptation des mâchoires propres à happer ; or, ces conditions de structure coordonnées, d’ordre aussi complexe, ne peuvent simultanément provenir de variations légères et indéterminées ; ce serait vouloir soutenir un paradoxe que de le nier. » Il est certain, cependant, si paradoxal que cela paraisse à M. Mivart, qu’il existe chez plusieurs astéries des forceps tridactyles sans tige, fixés solidement à la base, susceptibles d’exercer l’action de happer, et qui sont, au moins en partie, des organes défensifs. Je sais, grâce à l’obligeance que M. Agassiz a mise à me transmettre une foule de détails sur ce sujet, qu’il y a d’autres astéries chez lesquelles l’un des trois bras du forceps est réduit à constituer un support pour les deux autres, et encore d’autres genres où le troisième bras fait absolument défaut. M. Perrier décrit l’Echinoneus comme portant deux sortes de pédicellaires, l’un ressemblant à ceux de l’Echinus, et l’autre à ceux du Spatangus ; ces cas sont intéressants, car ils fournissent des exemples de certaines transitions subites résultant de l’avortement de l’un des deux états d’un organe.

M. Agassiz conclut de ses propres recherches et de celles de Müller, au sujet de la marche que ces organes curieux ont dû suivre dans leur évolution, qu’il faut, sans aucun doute, considérer comme des épines modifiées les pédicellaires des astéries et des oursins. On peut le déduire, tant du mode de leur développement chez l’individu, que de la longue et parfaite série des degrés que l’on observe chez différents genres et chez différentes espèces, depuis de simples granulations jusqu’à des pédicellaires tridactyles parfaits, en passant par des piquants ordinaires. La gradation s’étend jusqu’au mode suivant lequel les épines et les