328 | Hybridité. |
réciproques entre les deux mêmes espèces, car, selon que l’une des deux est employée comme père ou comme mère, il y a ordinairement quelque différence, et parfois une différence considérable, dans la facilité qu’on trouve à effectuer le croisement. En outre, les hybrides provenant de croisements réciproques diffèrent souvent en fécondité.
Ces lois singulières et complexes indiquent-elles que les croisements entre espèces ont été frappés de stérilité uniquement pour que les formes organiques ne puissent pas se confondre dans la nature ? Je ne le crois pas. Pourquoi, en effet, la stérilité serait-elle si variable, quant au degré, suivant les espèces qui se croisent, puisque nous devons supposer qu’il est également important pour toutes d’éviter le mélange et la confusion ? Pourquoi le degré de stérilité serait-il variable en vertu de prédispositions innées chez divers individus de la même espèce ? Pourquoi des espèces qui se croisent avec la plus grande facilité produisent-elles des hybrides très stériles, tandis que d’autres, dont les croisements sont très difficiles à réaliser, produisent des hybrides assez féconds ? Pourquoi cette différence si fréquente et si considérable dans les résultats des croisements réciproques opérés entre les deux mêmes espèces ? Pourquoi, pourrait-on encore demander, la production des hybrides est-elle possible ? Accorder à l’espèce la propriété spéciale de produire des hybrides, pour arrêter ensuite leur propagation ultérieure par divers degrés de stérilité, qui ne sont pas rigoureusement en rapport avec la facilité qu’ont leurs parents à se croiser, semble un étrange arrangement.
D’autre part, les faits et les règles qui précèdent me paraissent nettement indiquer que la stérilité, tant des premiers croisements que des hybrides, est simplement une conséquence dépendant de différences inconnues qui affectent le système reproducteur. Ces différences sont d’une nature si particulière et si bien déterminée, que, dans les croisements réciproques entre deux espèces, l’élément mâle de l’une est souvent apte à exercer facilement son action ordinaire sur l’élément femelle de l’autre, sans que l’inverse puisse avoir lieu. Un exemple fera mieux comprendre ce que j’entends en disant que la stérilité est une conséquence d’autres différences, et n’est pas une propriété dont les espèces ont été spécialement douées. L’aptitude que possèdent certaines