Productions d’eau douce. | 465 |
graines des plantes d’eau douce dans des étangs et dans des ruisseaux situés à de très grandes distances. La même intervention peut agir aussi efficacement à l’égard des œufs de quelques petits animaux d’eau douce.
Il est d’autres actions inconnues qui peuvent avoir aussi contribué à cette dispersion. J’ai constaté que les poissons d’eau douce absorbent certaines graines, bien qu’ils en rejettent beaucoup d’autres après les avoir avalées ; les petits poissons eux-mêmes avalent des graines ayant une certaine grosseur, telles que celles du nénuphar jaune et du potamogéton. Les hérons et d’autres oiseaux ont, siècle après siècle, dévoré quotidiennement des poissons ; ils prennent ensuite leur vol et vont s’abattre sur d’autres ruisseaux, ou sont entraînés à travers les mers par les ouragans ; nous avons vu que les graines conservent la faculté de germer pendant un nombre considérable d’heures, lorsqu’elles sont rejetées avec les excréments ou dégorgées en boulettes. Lorsque je vis la grosseur des graines d’une magnifique plante aquatique, le Nelumbium, et que je me rappelai les remarques d’Alph. de Candolle sur cette plante, sa distribution me parut un fait entièrement inexplicable ; mais Audubon constate qu’il a trouvé dans l’estomac d’un héron des graines du grand nénuphar méridional, probablement, d’après le docteur Hooker, le Nelumbium luteum. Or, je crois qu’on peut admettre par analogie qu’un héron volant d’étang en étang, et faisant en route un copieux repas de poissons, dégorge ensuite une pelote contenant des graines encore en état de germer.
Outre ces divers moyens de distribution, il ne faut pas oublier que lorsqu’un étang ou un ruisseau se forme pour la première fois, sur un îlot en voie de soulèvement par exemple, cette station aquatique est inoccupée ; en conséquence, un seul œuf ou une seule graine a toutes chances de se développer. Bien qu’il doive toujours y avoir lutte pour l’existence entre les individus des diverses espèces, si peu nombreuses qu’elles soient, qui occupent un même étang, cependant comme leur nombre, même dans un étang bien peuplé, est faible comparativement au nombre des espèces habitant une égale étendue de terrain, la concurrence est probablement moins rigoureuse entre les espèces aquatiques qu’entre les espèces terrestres. En conséquence, un