Aller au contenu

Page:Darwin - L’Origine des espèces (1906).djvu/533

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
  Morphologie. 515

mais l’examen comparé des diverses parties ou des divers organes chez le même individu. La plupart des physiologistes admettent que les os du crâne sont homologues avec les parties élémentaires d’un certain nombre de vertèbres, c’est-à-dire qu’ils présentent le même nombre de ces parties dans la même position relative réciproque. Les membres antérieurs et postérieurs de toutes les classes de vertébrés supérieurs sont évidemment homologues. Il en est de même des mâchoires si compliquées et des pattes des crustacés. Chacun sait que, chez une fleur, on explique les positions relatives des sépales, des pétales, des étamines et des pistils, ainsi que leur structure intime, en admettant que ces diverses parties sont formées de feuilles métamorphosées et disposées en spirale. Les monstruosités végétales nous fournissent souvent la preuve directe de la transformation possible d’un organe en un autre ; en outre, nous pouvons facilement constater que, pendant les premières phases du développement des fleurs, ainsi que chez les embryons des crustacés et de beaucoup d’autres animaux, des organes très différents, une fois arrivés à maturité, se ressemblent d’abord complètement.

Comment expliquer ces faits d’après la théorie des créations ? Pourquoi le cerveau est-il renfermé dans une boîte composée de pièces osseuses si nombreuses et si singulièrement conformées qui semblent représenter des vertèbres ? Ainsi que l’a fait remarquer Owen, l’avantage que présente cette disposition, en permettant aux os séparés de fléchir pendant l’acte de la parturition chez les mammifères, n’expliquerait en aucune façon pourquoi la même conformation se retrouve dans le crâne des oiseaux et des reptiles. Pourquoi des os similaires ont-ils été créés pour former l’aile et la jambe de la chauve-souris, puisque ces os sont destinés à des usages si différents, le vol et la marche ? Pourquoi un crustacé, pourvu d’une bouche extrêmement compliquée, formée d’un grand nombre de pièces, a-t-il toujours, et comme une conséquence nécessaire, un moins grand nombre de pattes ? et inversement pourquoi ceux qui ont beaucoup de pattes ont-ils une bouche plus simple ? Pourquoi les sépales, les pétales, les étamines et les pistils de chaque fleur, bien qu’adaptés à des usages si différents, sont-ils tous construits sur le même modèle ?