Page:Darwin - La Descendance de l’homme, 1881.djvu/214

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ressemblant aux larves des Ascidiens existants. Ces animaux ont produit probablement un groupe de poissons à l’organisation aussi inférieure que celle de l’Amphioxus ; ce groupe a dû, à son tour, produire les Ganoïdes, et d’autres poissons comme le Lépidosiren, qui sont certainement peu inférieurs aux amphibies. Nous avons vu que les oiseaux et les reptiles ont été autrefois étroitement alliés ; aujourd’hui les Monotrèmes rattachent faiblement les mammifères aux reptiles. Mais personne ne saurait dire actuellement par quelle ligne de descendance les trois classes les plus élevées et les plus voisines, mammifères, oiseaux et reptiles, dérivent de l’une des deux classes vertébrées inférieures, les amphibies et les poissons. On se représente aisément chez les mammifères les degrés qui ont conduit des Monotrèmes anciens aux anciens Marsupiaux, et de ceux-ci aux premiers ancêtres des mammifères placentaires. On arrive ainsi aux Lémuriens, qu’un faible intervalle seulement sépare des Simiadés. Les Simiadés se sont alors séparés en deux grandes branches, les singes du nouveau monde et ceux de l’ancien monde ; et c’est de ces derniers que, à une époque reculée, a précédé l’homme, la merveille et la gloire de l’univers.

Nous sommes ainsi arrivés à donner à l’homme une généalogie prodigieusement longue, mais, il faut le dire, de qualité peu élevée. Il semble que le monde, comme on en a souvent fait la remarque, se soit longuement préparé à l’avènement de l’homme, ce qui, dans un sens, est strictement vrai, car il descend d’une longue série d’ancêtres. Si un seul des anneaux de cette chaîne n’avait pas existé, l’homme ne serait pas exactement ce qu’il est. À moins de fermer volontairement les yeux, nous sommes, dans l’état actuel de nos connaissances, à même de reconnaître assez exactement notre origine sans avoir à en éprouver aucune honte. L’organisme le plus

    mal allié aux Ascidiens actuels habitant le bord de la mer. On pourrait citer bien des exemples de ces phénomènes périodiques, tels, par exemple, que la durée de la gestation chez les mammifères, la durée de certaines fièvres, etc. L’éclosion des œufs fournit aussi un excellent exemple, car, d’après M. Bartlett (Land and Water, 7 janv. 1871), les œufs des pigeons éclosent au bout de deux semaines ; ceux de la poule au bout de trois semaines ; ceux du canard au bout de quatre semaines, ceux de l’oie au bout de cinq et ceux de l’autruche au bout de sept semaines. Autant que nous en pouvons juger, une période une fois acquise avec la durée convenable ne serait pas sujette à changements ; elle pourrait donc être transmise telle quelle pendant un nombre quelconque de générations. Mais, si la fonction vient à changer, la période changerait aussi et la modification porterait sans doute sur toute une semaine. Cette conclusion serait curieuse si l’on pouvait en prouver la vérité ; car la période de la gestation de chaque mammifère, l’éclosion des œufs de chaque oiseau, et une foule d’autres phénomènes vitaux, trahiraient encore la patrie primitive de ces animaux.