Page:Darwin - La Descendance de l’homme, 1881.djvu/295

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tent souvent qu’à un sexe ; ce qui constitue une exception à la loi en vertu de laquelle les caractères qui se développent à un âge précoce tendent à se transmettre aux individus des deux sexes. Mais, comme nous l’avons déjà fait remarquer, cette loi ne paraît pas être aussi généralement vraie que l’autre proposition, à savoir que les caractères qui apparaissent à une période tardive de la vie se transmettent exclusivement aux individus appartenant au même sexe que ceux chez lesquels ces caractères ont paru d’abord. Le fait que des particularités anormales s’attachent à un sexe, longtemps avant que les fonctions sexuelles soient devenues actives, nous permet de conclure qu’il doit y avoir une différence de quelque nature entre les individus des deux sexes, même à un âge très-précoce. Quant aux maladies propres aux individus d’un seul sexe, nous ignorons trop absolument l’époque à laquelle elles peuvent surgir, pour qu’il nous soit permis d’en tirer aucune conclusion certaine. La goutte semble, toutefois, confirmer la loi que nous avons formulée ; car elle résulte ordinairement d’excès faits longtemps après l’enfance et le père transmet cette maladie à ses fils bien plus souvent qu’à ses filles.

Les mâles des diverses races domestiques de moutons, de chèvres et de bétail, diffèrent des femelles au point de vue de la forme et du développement des cornes, du front, de la crinière, du fanon, de la queue, de la bosse sur les épaules, toutes particularités qui, conformément à la loi que nous avons posée, ne se développent complètement qu’à un âge assez avancé. Les chiens ne diffèrent ordinairement pas des chiennes ; cependant, chez certaines races, et surtout chez le lévrier écossais, le mâle est plus grand et plus pesant que la femelle ; en outre, comme nous le verrons dans un chapitre subséquent, la taille du mâle continue à augmenter jusqu’à un âge très-avancé ; ce qui, en vertu de notre règle, explique quil transmet cette particularité à ses descendants mâles seuls. On n’observe, au contraire, la robe tigrée que chez les chattes ; elle est déjà très-apparente à la naissance, fait qui constitue une exception à notre règle. Les mâles seuls d’une certaine race de pigeons portent des raies noires qui apparaissent déjà sur les oiseaux encore au nid ; mais ces raies s’accentuent à chaque mue successive ; ce cas est donc en partie contraire, en partie favorable à la règle. Chez les pigeons Messagers et chez les Grosse-gorges le développement complet des caroncules et du jabot n’a lieu qu’un peu tard, et, conformément à notre règle, ces caractères à l’état parfait ne se transmettent qu’aux mâles. Les cas suivants rentrent peut-être dans la classe précédemment mentionnée où les individus