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de la vie, ont été seules conservées ; et que, pour ce motif, toutes ou la plupart n’ont été transmises qu’à la descendance mâle adulte. Toute variation en éclat surgissant chez les femelles et chez les jeunes, n’ayant aucune utilité pour eux, aurait échappé à la sélection, et de plus aurait été éliminée par cette dernière si elle était dangereuse. Aussi les femelles et les jeunes n’ont pas dû se modifier, ou, ce qui a été plus fréquent, n’ont été que partiellement modifiés par la transmission de quelques variations successives des mâles. Les conditions d’existence auxquelles les deux sexes ont été exposés ont peut-être exercé sur eux une certaine action directe, et c’est surtout chez les femelles, qui n’ont pas subi beaucoup d’autres modifications, que leur effet s’est fait le mieux sentir. Le libre entre-croisement des individus a dû rendre ces changements uniformes comme tous les autres d’ailleurs. Dans quelques cas, surtout chez les oiseaux vivant sur le sol, les femelles et les jeunes peuvent, indépendamment des mâles, avoir été modifiés dans un but de sécurité, et avoir subi un assombrissement semblable de leur plumage.

Catégorie II. Lorsque la femelle adulte est plus brillante que le mâle adulte, le premier plumage des jeunes des deux sexes ressemble au plumage du mâle. — Cette catégorie comprend des cas absolument contraires à ceux de la classe précédente, car les femelles portent ici des couleurs plus vives et plus apparentes que celles des mâles ; or les jeunes, autant qu’on les connaît, ressemblent aux mâles adultes, au lieu de ressembler aux femelles adultes. Mais la différence entre les sexes n’est jamais, à beaucoup près, aussi grande que celle qu’on rencontre dans la première catégorie, et les cas sont relativement rares. M. Wallace, qui a, le premier, attiré l’attention sur le singulier rapport qui existe entre la coloration terne des mâles et le fait qu’ils remplissent les devoirs de l’incubation, insiste fortement sur ce point[1], car il le considère comme une preuve irrécusable que les couleurs ternes servent à protéger l’oiseau pendant l’époque de la nidification. Une autre opinion me paraît plus probable, et les cas étant curieux et peu nombreux, je vais brièvement signaler tout ce que j’ai pu recueillir sur cette question.

Dans une section du genre Turnix, oiseau ressemblant à la caille, la femelle est invariablement plus grosse que le mâle (elle est presque deux fois aussi grosse que le mâle chez une espèce australienne), fait qui n’est pas usuel chez les gallinacés. Dans la plupart des es-

  1. Westminster Review, July 1867 ; et A. Murray, Journal of Travel, 1868, p. 83.