Page:Darwin - La Descendance de l’homme, 1881.djvu/650

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et la femme. Je sais que quelques auteurs doutent qu’il y ait aucune différence inhérente ; mais l’analogie avec les animaux inférieurs, qui présentent d’autres caractères sexuels secondaires, rend cette proposition tout au moins probable. Personne ne contestera que le caractère du taureau ne diffère de celui de la vache, le caractère du sanglier sauvage de celui de la truie, le caractère de l’étalon de celui de la jument ; et, comme le savent fort bien les gardiens de ménageries, le caractère des grands singes mâles de celui des femelles. La femme semble différer de l’homme dans ses facultés mentales, surtout par une tendresse plus grande et un égoïsme moindre, et ceci se vérifie même chez les sauvages, comme le prouve un passage bien connu des voyages de Mungo Park, et les récits de beaucoup d’autres voyageurs. La femme déploie à un éminent degré sa tendresse à l’égard de ses enfants, par suite de ses instincts maternels ; il est vraisemblable qu’elle puisse l’étendre jusqu’à ses semblables. L’homme est l’égal d’autres hommes, il ne redoute point la rivalité, mais elle le conduit à l’ambition, et celle-ci à l’égoïsme. Ces facultés semblent faire partie de son malheureux héritage naturel. On admet généralement que chez la femme les facultés d’intuition, de perception rapide, et peut-être d’imitation, sont plus fortement développées que chez l’homme ; mais quelques-unes au moins de ces facultés caractérisent les races inférieures, elles ont, par conséquent, pu exister à un état de civilisation inférieure.

Ce qui établit la distinction principale dans la puissance intellectuelle des deux sexes, c’est que l’homme atteint, dans tout ce qu’il entreprend, un point auquel la femme ne peut arriver, quelle que soit, d’ailleurs, la nature de l’entreprise, qu’elle exige ou une pensée profonde, la raison, l’imagination, ou simplement l’emploi des sens et des mains. Que l’on dresse deux listes des hommes et des femmes qui se sont le plus distingués dans la poésie, la peinture, la sculpture, la musique, y compris la composition et l’exécution, — l’histoire, la science, et la philosophie : les deux listes d’une demi-douzaine de noms pour chaque art ou science, ne supporteront pas la comparaison. Nous pouvons ainsi déduire de la loi de la déviation des moyennes, si bien expliquée par M. Galton dans son livre sur le Génie héréditaire, que si les hommes ont une supériorité décidée sur les femmes en beaucoup de points, la moyenne de la puissance mentale chez l’homme doit excéder celle de la femme.

Les ancêtres semi-humains mâles de l’homme et les sauvages, ont, pendant bien des générations, lutté les uns contre les autres