Page:Darwin - La Descendance de l’homme, 1881.djvu/72

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mienne. Il cite, entre autres cas, l’os malaire qui, chez quelques quadrumanes et chez quelques autres mammifères, se compose normalement de deux parties. C’est dans cet état qu’il se trouve chez le fœtus humain âgé de deux mois, et qu’il se retrouve parfois, à cause d’un arrêt de développement, chez l’homme adulte, surtout chez les races prognathes inférieures. Canestrini en conclut que, chez un ancêtre de l’homme, cet os devait être normalement partagé en deux portions qui se sont ultérieurement soudées pour n’en plus faire qu’une. L’os frontal de l’homme se compose d’une seule pièce, mais dans l’embryon, chez les enfants, ainsi que chez presque tous les mammifères inférieurs, il se compose de deux pièces séparées par une suture distincte. Cette suture persiste parfois, d’une manière plus ou moins apparente, chez l’homme adulte, plus fréquemment dans les anciens crânes que dans les crânes récents, et tout spécialement, ainsi que Canestrini l’a fait remarquer, dans ceux qui appartiennent au type brachycéphale exhumés du diluvium. Il conclut dans ce cas, comme dans celui des os malaires qui lui est analogue. Il semble, par cet exemple ainsi que par d’autres que nous aurons à signaler, que si les races anciennes se rapprochent plus souvent que les races modernes des animaux par certains de leurs caractères, c’est parce que ces dernières sont, dans la longue série de la descendance, un peu plus éloignées de leurs premiers ancêtres semi-humains.

Différents auteurs ont considéré comme des cas de retour diverses autres anomalies, plus ou moins analogues aux précédentes, qui se présentent chez l’homme ; mais cela est douteux, car nous aurions à descendre très bas dans la série des mammifères avant de trouver de semblables conformations normales[1].

    Cliniche, Turin, 1871), un autre mémoire sur cette anomalie. Il affirme qu’on peut retrouver des traces de cette division chez environ 2 p. 100 des crânes adultes ; il fait aussi remarquer que cette anomalie se rencontre plus fréquemment chez les crânes prognathes qui n’appartiennent pas à la race aryenne. Voir aussi G. Delorenzi, Tre nuovi casi d’anomalia dell’osso malare, Turin 1872 ; et E. Morselli, Supra una rara anomalia dell’osso malare. Modène, 1872. Plus récemment encore, Gruber a publié un pamphlet sur la division de cet os. J’indique ces autorités, parce qu’un critique a jugé à propos, sans aucune raison d’ailleurs, de disputer mon assertion.

  1. Isid. Geoffroy Saint-Hilaire cite toute une série de cas dans son Histoire des Anomalies, vol. III, p. 437. Un critique, Journal of Anatomy and Physiology, 1871, p. 366, me blâme beaucoup de n’avoir pas discuté les nombreux cas d’arrêts de développement qui ont été signalés. Il soutient que, dans mon hypothèse, « toutes les conditions intermédiaires d’un organe pendant son développement n’indiquent pas seulement un but, mais ont autrefois constitué un but. » Je n’admets pas absolument cette assertion. Pourquoi des variations ne se présenteraient-elles pas pendant une phase primitive du développement, qui n’auraient aucun rapport avec le retour ? Cependant ces variations pourraient se