Page:Darwin - Rôle des vers de terre dans la formation de la terre végétale.djvu/62

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que cette chaux soit employée comme nourriture. Des pièces de viande crue et d’autres rôties furent plusieurs fois fixées par de longues aiguilles à la surface du sol dans mes pots, et toutes les nuits on pouvait voir les vers les tirailler ; ils suçaient les bords des pièces et en consommèrent ainsi une bonne portion. La graisse crue semble être préférée par eux même à la viande crue et à toutes les autres substances qui leur furent données, et ils en consommèrent beaucoup. Ils sont cannibales, car les deux moitiés d’un ver mort ayant été placées dans deux des pots, elles furent traînées à l’intérieur des galeries et grignotées ; mais, autant que je pouvais en juger, ils préfèrent la viande fraîche à celle en putréfaction, et à cet égard je ne suis pas d’accord avec Hoffmeister.

Léon Frédéricq déclare[1] que le fluide digestif des vers est de la même nature que la sécrétion du pancréas des animaux supérieurs ; cette conclusion est parfaitement en accord avec les sortes de nourriture que consomment les vers. Le suc pancréatique produit l’émulsion de la graisse et nous venons de voir avec quelle voracité les vers dévorent la graisse ; il dissout la fibrine, et les vers mangent de la viande crue ; il convertit l’amidon en sucre de raisin avec une rapidité merveilleuse, et nous allons montrer tout à l’heure que le fluide digestif des vers agit sur l’amidon[2]. Mais ils

  1. Archives de zoologie expérimentale, tome VII, 1878, p. 394.
  2. Au sujet de l’action du ferment pancréatique, consulter : A Text-Book of Physiology, par Michael Foster. 2e édit, pp. 198-203, 1878.