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CHILI CENTRAL.

sentiment de satisfaction que nous arrivâmes chez notre hôte. À peine étions-nous de retour, que la tempête se déchaînait dans toute sa violence ; il était très-heureux pour nous qu’elle n’eût pas commencé trois heures plus tôt.

26 août. — Nous quittons Jajuel et nous traversons une seconde fois le bassin de San Felipe. Il fait un temps admirable, et l’atmosphère est d’une grande pureté. L’épaisse couche de neige qui vient de tomber fait admirablement ressortir les formes de l’Aconcagua et de la chaîne principale ; le spectacle est imposant. Nous nous dirigeons actuellement vers Santiago, capitale du Chili. Nous traversons le Cerro del Talguen et nous passons la nuit dans un petit rancho. Notre hôte a plus que de l’humilité quand il compare le Chili aux autres pays : « Quelques-uns voient avec les deux yeux, d’autres avec un œil ; mais, pour ma part, je crois que le Chili n’y voit pas du tout. »

27 août. — Après avoir traversé plusieurs collines peu élevées, nous descendons dans la petite plaine de Guitron, entourée de tous côtés par des collines. Dans des bassins tels que celui-ci, bassins situés de 1000 à 2000 pieds au-dessus du niveau de la mer, deux espèces d’acacia, aux formes rabougries, croissent en grand nombre, mais ils sont très-espacés les uns des autres. On ne trouve jamais ces arbres près de la côte ; c’est un autre trait caractéristique à ajouter à ceux qu’offrent déjà ces bassins. Nous traversons une petite chaîne de collines qui sépare Guitron de la grande plaine où se trouve Santiago. Du haut de cette chaîne, la vue est admirable : une plaine parfaitement plate, couverte en partie par des bois d’acacia ; au loin, la ville s’adossant à la base des Andes, dont les pics neigeux reflètent toutes les teintes du soleil couchant. Au premier coup d’œil on reconnaît que cette plaine représente une ancienne mer intérieure. Dès que nous sommes dans la plaine, nous mettons nos montures au galop et nous arrivons à Santiago avant qu’il fasse tout à fait nuit.

Je passe une semaine fort agréable dans cette ville. J’occupais mes matinées à aller visiter divers points de la plaine ; le soir, je dînais avec plusieurs négociants anglais dont l’hospitalité est bien connue. Une source de plaisir continuel est de grimper sur le rocher (Saint-Lucia) qui se trouve au centre même de la ville. De là, la vue est fort jolie et, comme je l’ai dit, toute particulière. On me dit que ce caractère est commun aux villes construites sur les grandes plates-formes du Mexique. Inutile de parler de la ville