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TREMBLEMENT DE TERRE.

400 milles (640 kilomètres) dans une autre direction à angle droit avec la première. Aussi existe-t-il probablement là un lac de lave souterrain ayant une superficie presque double de celle de la mer Noire. La relation intime et complexe tout à la fois des forces d’éruption et de soulèvement pendant ces phénomènes, nous prouve que les forces qui soulèvent les continents par degrés sont identiques à celles qui font sortir des matières volcaniques par certains orifices. Je crois, pour bien des raisons, que les fréquents tremblements de terre sur cette ligne de côtes proviennent du déchirement des couches, conséquence nécessaire de la tension de la terre au moment des soulèvements et de leur injection par des roches à l’état liquide. Ces déchirements et ces injections répétés assez souvent (et nous savons que les tremblements de terre affectent fort souvent les mêmes superficies de la même façon) finiraient par produire une chaîne de collines ; — l’île linéaire de Sainte-Marie, qui a été soulevée trois fois aussi haut que le pays environnant, semble soumise à cette cause. Je crois que l’axe solide d’une montagne ne diffère par la formation d’une colline volcanique qu’en ce que les roches en fusion ont été injectées à plusieurs reprises dans la première, au lieu d’avoir été rejetées comme dans la seconde. Je crois, en outre, qu’on ne peut expliquer la formation des grandes chaînes de montagnes telles que la Cordillère, où les couches recouvrant l’axe injecté de roches plutoniennes ont été relevées dans bien des directions parallèles, qu’en supposant que la roche formant l’axe a été injectée à bien des reprises différentes et après des intervalles suffisamment longs pour que les parties supérieures, jouant le rôle de coins, aient eu le temps de se refroidir et de se solidifier. En effet, si les couches avaient été repoussées d’un seul coup dans leur position actuelle, c’est-à-dire redressées presque verticalement, les entrailles mêmes de la terre auraient fait éruption, et, au lieu d’axes abrupts de roches solidifiées sous une immense pression, des torrents de lave se seraient écoulés dans tous les endroits où se sont produits ces soulèvements[1].

  1. Voir les Geological Transactions, vol. V, pour le récit complet des phénomènes volcaniques qui ont accompagné le tremblement de terre du 20 février 1835, et pour les conclusions qu’il y a lieu d’en tirer.