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ASPECT DU PAYSAGE.

dans ce pays, sont ordinairement plus dures que les roches environnantes ; aussi, à mesure que les montagnes se désagrègent ces veines finissent par paraître à la surface. En second lieu, presque tous les paysans, surtout dans les parties septentrionales du Chili, savent fort bien reconnaître les minerais. Dans les provinces de Coquimbo et de Copiapó, où les mines sont si abondantes, le bois de chauffage est fort rare et les habitants explorent montagnes et vallées pour en trouver ; c’est ainsi que l’on a découvert presque toutes les mines les plus riches. Un jour, un homme jette une pierre à son âne pour le faire avancer, puis l’idée lui vient que cette pierre est fort lourde et il la ramasse : c’était un lingot d’argent ; à peu de distance il trouva la veine qui s’élevait comme un véritable mur de métal. Il avait découvert la mine de Chanuncillo qui produisit, en quelques années, plusieurs millions de francs d’argent. Souvent aussi les mineurs, armés d’une pioche, vont se promener le dimanche dans les montagnes. Dans la partie méridionale du Chili, où je me trouve, ce sont les bergers, en accompagnant les troupeaux dans tous les recoins de la montagne, qui découvrent ordinairement les mines.

20 mars. — À mesure que nous remontons la vallée, la végétation devient extrêmement rare ; on ne trouve plus guère que quelques fleurs alpestres fort jolies. C’est à peine si l’on aperçoit un quadrupède, un oiseau, ou même un insecte. Les hautes montagnes, portant çà et là quelques traces de neige, se détachent admirablement les unes des autres ; une immense couche d’alluvium stratifié remplit les vallées. S’il me fallait indiquer les caractères qui m’ont le plus frappé dans les Andes et que je n’ai pas remarqués dans les autres chaînes de montagnes que j’ai parcourues, je citerais : les bandes plates formant quelquefois des plaines étroites de chaque côté des vallées ; les couleurs brillantes, principalement rouge et pourpre, des rochers de porphyre absolument nus et s’élevant perpendiculairement ; les grandes dykes continues qui ressemblent à des murs ; les couches admirablement distinctes qui, quand elles sont redressées presque verticalement, forment les pointes centrales si sauvages et si pittoresques, mais qui, quand elles sont inclinées en pentes plus douces, composent les grandes montagnes massives à l’extérieur de la chaîne ; et enfin les piles coniques de détritus brillamment colorés qui s’élèvent en pente rapide de la base des montagnes jusqu’à une hauteur de plus de 2000 pieds.