Page:Darwin - Voyage d’un naturaliste autour du monde, trad. Barbier, 1875.djvu/437

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
421
PLANTES.

archipel si l’on considère qu’il n’est éloigne du continent que par une distance de 5 ou 600 milles ; en outre, selon Collnett (p. 58), des bambous, des cannes à sucre, des noix de palmier, en un mot des bois de toute espèce, sont souvent amenés par les courants sur les côtes sud-est de ces îles. Cent plantes à fleurs sur 185, ou sur 175 si l’on ne tient pas compte des plantes importées, étant des espèces nouvelles, c’est là, je crois, plus qu’il n’en faut pour que l’archipel des Galapagos constitue une région botanique distincte ; cependant cette flore est loin d’être aussi remarquable que celle de Sainte-Hélène, ou, si je dois en croire le docteur Hooker, que celle de Juan Fernandez. La singularité de la flore de l’archipel des Galapagos se remarque surtout dans certaines familles ; ainsi, on y trouve 21 espèces de composées, dont 20 sont particulières à cet archipel ; ces 20 espèces appartiennent à douze genres, et, sur ces genres, dix ne se trouvent que dans les îles Galapagos. Le docteur Hooker m’apprend que cette flore a très-certainement un caractère américain, et qu’il ne peut trouver chez elle aucune affinité avec celle du Pacifique. Si nous en exceptons donc dix-huit coquillages marins, un coquillage d’eau douce et un coquillage terrestre, qui semble être venu ici comme colon des îles centrales du Pacifique ; si nous en exceptons aussi l’espèce distincte de moineaux appartenant au Pacifique, nous voyons que cet archipel, bien que situé dans l’océan Pacifique, fait zoologiquement partie de l’Amérique.

Si ce caractère provenait uniquement d’une immigration américaine, il n’y aurait rien de bien remarquable dans ce fait ; mais nous avons vu que la grande majorité de tous les animaux terrestres et que plus de la moitié des plantes sont des productions indigènes. Rien de frappant comme de se voir entouré par de nouveaux oiseaux, de nouveaux reptiles, de nouveaux coquillages, de nouveaux insectes, de nouvelles plantes, et cependant de se sentir transporté, pour ainsi dire, dans les plaines tempérées de la Patagonie ou dans les déserts si chauds du Chili septentrional, par d’innombrables détails insignifiants de conformation, et même par le ton de la voix et le plumage des oiseaux. Comment se fait-il que, sur ces petits îlots, qui tout dernièrement encore, géologiquement parlant, devaient être recouverts par les eaux de l’Océan, îlots formés de laves basaltiques, et qui diffèrent par conséquent du caractère géologique du continent américain, outre qu’ils sont situés sous un climat particulier ; comment se fait-il, dis-je, que sur ces petits îlots les habitants indigènes différant et