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Page:Darwin - Voyage d’un naturaliste autour du monde, trad. Barbier, 1875.djvu/80

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MALDONADO.

encore mou, par suite des effets de la chaleur intense. À en juger par les fragments non comprimés, l’étincelle devait avoir un diamètre (si l’on peut s’exprimer ainsi) de 1 pouce et quart. M. Hachette et M. Beudant ont réussi, à Paris, à faire des tubes[1] semblables sous tous les rapports à ces fulgurites, en faisant passer des décharges électriques extrêmement intenses à travers du verre réduit en poudre impalpable ; quand ils ajoutaient du sel au verre pour en augmenter la fusibilité, les tubes avaient des dimensions beaucoup plus considérables. Ils ne réussirent pas à obtenir de tubes en faisant passer l’étincelle au travers du feldspath ou du quartz pulvérisé. Un tube obtenu dans du verre pulvérisé avait près de 1 pouce de long, exactement 982 millièmes de pouce, et un diamètre intérieur de 19 millièmes de pouce. Quand on lit en même temps qu’on employa la plus forte batterie qui existât à Paris et qu’on se servit de substances aussi facilement fusibles que le verre pour arriver à former des tubes aussi petits, quel étonnement ne ressent-on pas en pensant à la force d’une décharge électrique qui, frappant le sable en plusieurs endroits, a pu former des cylindres ayant, dans un cas, au moins 30 pieds de long et un diamètre intérieur, aux endroits non comprimés, de 1 pouce et demi, et cela dans une substance aussi extraordinairement réfractaire que le quartz !

Les tubes, comme je l’ai déjà fait remarquer, pénètrent dans le sable dans une direction presque verticale. L’un d’eux cependant, moins régulier que les autres, déviait de la ligne droite ; le coude le plus considérable faisait un angle de 33 degrés. Deux petites branches, écartées d’environ 1 pied, partaient de ce même tube, l’une la pointe tournée en haut, l’autre en bas. Ce fait est d’autant plus remarquable, que le fluide électrique a dû revenir en arrière en faisant avec sa principale ligne de direction un angle aigu de 26 degrés. Outre ces quatre tubes, qui gardaient leur position verticale et que je pus suivre au-dessous de la surface, je trouvai sur le sol plusieurs autres groupes de fragments appartenant certainement à des tubes qui devaient avoir été formés dans le voisinage. Tous se trouvaient sur le sommet plat d’un monticule de sable mouvant ayant environ 60 mètres sur 20, situé au milieu de quelques monticules de sable plus élevés, à une distance d’environ un demi-mille d’une chaîne de collines ayant 4 ou 500 pieds de hau-

  1. Annales de chimie et de physique, vol. XXXVII, p. 319.