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L’ÉMANCIPATION DE LA FEMME

ticulières qui frappent les femmes. Fort bien, mais qu’ont fait ces chevaleresques gentlemen ? où sont les torts qu’ils ont redressés ? On aurait pu supposer que quand leurs yeux seraient une fois ouverts sur les injustices dont souffrent des femmes délaissées ils ne perdraient pas un instant pour y mettre un terme. Tout le monde reconnaît, par exemple, que le mari anglais dans la classe du peuple, passe pour maltraiter brutalement sa femme. Un seul de ces membres qui pensent que les femmes ne doivent pas être armées du vote, mais que le législateur doit particulièrement les protéger, un seul de ces législateurs, dis-je, a-t-il présenté un bill pour fustiger les hommes qui maltraitent les femmes ? Nullement. Il est en vérité remarquable qu’aucun bill en faveur des femmes n’ait été présenté, si ce n’est pas les hommes qui ont voté pour leur donner le suffrage. En effet, tous les hommes peuvent parler ; mais quand ils viennent à l’action, rarement un seul se tourmentera pour venir en aide à des femmes qui ne sont pas heureuses de le seconder de tous leurs efforts.

Mais je m’imagine entendre quelques ladies dire : « Après tout, ne sommes-nous pas protégées ? Pourrions-nous en rien mieux nous protéger nous-mêmes que nous le sommes ? Pourrions-nous, par nos efforts personnels non secondés, obtenir moitié du confort et du luxe dont nous jouissons maintenant, grâce à l’amabilité et à la générosité des hommes ? C’est nous qui sommes traitées en supérieures ; c’est nous surtout qui sommes accablées par les honneurs et les priviléges sociaux. Aux femmes on donne partout la meilleure et la première place ; tout ce qui est pénible doit être fait par l’homme ; s’il n’y a pas assez de place pour tous, les garçons sont tenus à marcher pour que les filles prennent place dans la voiture. » Très-bien, mesdames, et quelle leçon devons-nous tirer de là ? C’est que des hommes bons, que nous respectons tous, sont sous ce rapport à la fois justes et généreux. Ils ont honte de prendre avantage de la faiblesse des autres ou de leur propre force ; ils ne veulent pas recueillir ce qu’ils n’ont pas moissonné ; ils aiment mieux donner que prendre et se font à la fois un de-