Page:Daudet - Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon, 1872.djvu/261

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quai. Il appelle son ami, et le regarde avec tendresse : « Emmène-moi, semble dire son œil triste, emmène-moi dans la barque, loin, bien loin de cette Arabie en carton peint, de cet Orient ridicule, plein de locomotives et de diligences, où — dromadaire déclassé — je ne sais plus que devenir. Tu es le dernier Turc, je suis le dernier chameau… Ne nous quittons plus, ô mon Tartarin… »

— Est-ce que ce chameau est à vous ? demande le capitaine.

— Pas du tout ! répondit Tartarin, qui frémit à l’idée d’entrer dans Tarascon avec cette escorte ridicule ; et, reniant impudemment le compagnon de ses infortunes, il repousse du pied le sol algérien, et donne à la barque l’élan du départ… Le chameau flaire l’eau, allonge le cou, fait craquer ses jointures et, s’élançant derrière la barque à