Page:Daudet - Contes du lundi, Lemerre, 1873.djvu/36

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drapeau… je veux mon drapeau… » A la fin une fenêtre s’ouvrit :

« C’est toi, Hornus ?

— Oui, mon colonel, je…

— Tous les drapeaux sont à l’Arsenal,… tu n’as qu’à y aller, on te donnera un reçu…

— Un reçu ?… Pourquoi faire ?…

— C’est l’ordre du maréchal…

— Mais, colonel… —

« F…-moi la paix !… » et la fenêtre se referma.

Le vieil Hornus chancelait comme un homme ivre.

« Un reçu…, un reçu,… » répétait-il machinalement… Enfin il se remit à marcher, ne comprenant plus qu’une chose, c’est que le drapeau était à l’Arsenal et qu’il fallait le ravoir à tout prix.

V.

Les portes de l’Arsenal étaient toutes grandes ouvertes pour laisser passer les fourgons prussiens qui attendaient, rangés dans la cour. Hornus en entrant eut un frisson. Tous les autres porte-drapeaux étaient là, cinquante ou soixante officiers, navrés, silencieux

; et ces