Page:Daudet - Jack, I.djvu/213

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sans s’arrêter. Déjà le soleil est presque chaud ; l’aube de tout à l’heure est devenue un foyer d’éblouissants rayons. Jack comprend qu’il approche. Il va, courbé, chancelant, heurté aux pierres qui roulent sous ses pieds ; mais il va.

Enfin, en haut, il voit un clocher qui s’élève au-dessus de toits groupés dans une masse de verdure. Allons, encore un effort. Il faut arriver jusque-là. Mais les forces lui manquent.

Il s’affaisse, se relève, retombe encore, et à travers ses paupières qui battent, il entrevoit tout près de lui une petite maison chargée de vignes, de glycines en fleurs, de rosiers montants, qui la recouvrent jusqu’au faîte de son pigeonnier et de sa tourelle toute rose de briques neuves. Au-dessus de la porte, entre l’ombre flottante des lilas déjà fleuris, une inscription en lettres d’or : « Parva domus, magna quies. »

Oh ! la jolie maison tranquille, baignée de lumière blonde. Tout est encore fermé, pourtant on ne dort pas, car voici une voix de femme, fraîche et joyeuse, qui se met à chanter :

Mes souliers sont rouges,
Ma mie, ma mignonne.

Cette voix, cette chanson… Jack croit rêver. Mais les deux battants d’une persienne claquent sur le mur, et une femme apparaît, toute blanche, dans un négligé