— Ah ! tu as de la chance, toi, disait Labassindre. Quand je pense que demain à cette heure-ci, pendant que vous dînerez là à cette place, je m’attablerai dans quelque bouillon Duval étouffant, où l’air qu’on respire, les vitres couvertes de buée, la portion qu’on vous sert, tout sent l’étuve, la vapeur, le chaud.
— Encore, si on était sûr de dîner régulièrement au bouillon Duval, grommela le docteur Hirsch.
D’Argenton eut un élan :
— Eh bien, qui vous empêche de passer quelque temps ici ? La maison est grande, la cave bien garnie…
— Mais oui, ajouta Charlotte avec empressement, restez donc… Ce sera gentil… Nous ferons des excursions.
— Et l’Opéra ? fit Labassindre, qui répétait tous les jours.
— Mais vous, monsieur Hirsch, vous ne jouez pas à l’Opéra.
— Ma foi, comtesse, j’ai bien envie d’accepter votre invitation. J’ai très peu de chose à faire pour l’instant, puisque toute ma clientèle est à la campagne.
La clientèle du docteur Hirsch à la campagne ! C’était excessivement bouffon. Pourtant personne n’eut envie de rire ; entre Ratés, ils étaient accoutumés à se passer bien des fantaisies.
— Allons ! décide-toi, fit d’Argenton. D’abord, c’est un service à me rendre. Dans l’état de santé où je me