Page:Daudet - Jack, I.djvu/334

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— Tiens, mon oncle, dit en se retournant celui qu’on appelait le Nantais.

Il y eut une minute d’effusion, d’accolades. On présenta l’apprenti que le Nantais toisa d’un air méprisant, mais auquel madame Roudic parla avec douceur :

— J’espère que vous vous trouverez bien chez nous, mon enfant.

Puis on entra.

Derrière la maison sans profondeur, le couvert était mis dans un petit jardin desséché, brûlé, plein de légumes montés et de fleurs en graines. D’autres jardins tout pareils, séparés seulement les uns des autres par des treillages, s’étendaient tout le long d’un petit bras de la Loire, qui semblait comme la Bièvre de ce coin-là, bordé de linge étendu, de filets qui séchaient, de chanvre en train de rouir, et traînant les détritus de tous ces ménages d’ouvriers.

— Et Zénaïde ? demanda Labassindre au moment de s’asseoir sous la tonnelle devant la table.

— Il faut manger la soupe en l’attendant, dit Roudic, elle va venir tout à l’heure. Elle est en journée au château. Ah ! dam, c’est devenu une fameuse couturière, maintenant.

— Elle travaille chez le Singe ? cria Labassindre, qui avait toujours sa réception sur le cœur… Eh bien, elle doit en avoir de l’agrément. Un homme si fier, si arrogant.

Et il commença à déblatérer contre le directeur,