Page:Daudet - Jack, II.djvu/218

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pendant ce temps-là, se plissait, se ridait de contentement.

Cette gaîté bruyante, que la minceur des cloisons répandait par tout l’étage, se rapprocha des deux amis et fit enfin son entrée dans la mansarde sous la figure d’une grande et vigoureuse femme du peuple de trente à trente-cinq ans, serrée dans un de ces longs sarreaux bleus à bavette avec lesquels les porteuses de pain se préservent de la farine. Celui de madame Weber faisait valoir une taille robuste et bien prise.

— Ah ! farceur, farceur, dit-elle en rentrant, son enfant sur le bras… c’est vous qui avez fait ce coup-là… Mais voyez donc comme il est bien chaussé, mon garçon !

Et elle riait, elle riait, avec une petite larme dans le coin de l’œil.

— Elle est malicieuse, hein ?… disait Bélisaire, riant à se tordre, lui aussi… Comment a-t-elle pu deviner que c’était moi ?

Cette grande joie apaisée, madame Weber s’assit à la table, prit une tasse de café dans quelque chose qui pouvait bien être un ancien pot à moutarde ; puis on lui présenta Jack comme le futur camarade. Je dois dire qu’elle accueillit d’abord cette idée avec une certaine réserve ; mais quand elle eut bien examiné le postulant à cette distinction suprême, quand elle eut appris que Jack et Bélisaire se connaissaient depuis dix ans, et qu’elle avait en face d’elle le héros de la fameuse