Page:Daudet - Jack, II.djvu/228

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Depuis le jour où il voulait m’empêcher d’arriver jusqu’à notre ami Jack, il sait que le vieux Rivals a le poignet encore solide.

Mais il avait beau dire, les enfants parlaient plus bas, marchaient plus vite en passant devant « Parva domus. » Ils sentaient qu’il n’y avait rien de bon pour eux là dedans et semblaient deviner le regard venimeux que leur lançaient les lunettes du docteur Hirsch embusqué derrière ses persiennes closes. En somme, qu’avaient-ils à craindre de l’espionnage de ce fantoche ? Tout n’était-il pas fini entre d’Argenton et le fils de Charlotte ? Depuis trois mois ils ne se voyaient plus, vivaient séparés par une constante pensée de haine qui les éloignait chaque jour davantage comme deux rivages que le flot creuse en allant sans cesse de l’un à l’autre. Jack aimait trop sa mère pour lui en vouloir d’avoir un amant, mais depuis que son amour pour Cécile lui avait appris la dignité, il haïssait l’amant de sa mère, le faisait responsable de la faute de cette femme faible, rivée à sa chaîne par la violence, la tyrannie, tout ce qui éloigne les âmes fières et indépendantes. Charlotte, qui craignait les scènes, les explications, avait renoncé à réconcilier ces deux hommes. Elle ne parlait plus à d’Argenton de son fils ; seulement, en cachette, elle donnait à celui-ci des rendez-vous.

Deux ou trois fois même, elle était venue en fiacre et voilée à l’atelier de la rue Oberkampf, demander