Page:Daudet - Jack, II.djvu/294

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C’est lui, au contraire, qui doit se trouver bien seul sans moi… Un homme qui ne sait rien faire de ses mains que tenir un porte-plume. Ah ! c’est bien un véritable artiste, celui-là.

— Est-ce que tu vas répondre ?

— Répondre ?… À un insolent qui s’est permis de lever la main sur moi… Ah ! tu ne me connais pas. J’ai, grâce à Dieu, plus de fierté que cela… Je n’ai pas seulement fini de la lire, sa lettre. Je l’ai jetée je ne sais où, déchirée en mille morceaux… Merci ! Ce n’est pas avec des femmes élevées comme je l’ai été, dans un château, au milieu de l’opulence, qu’on se permet des vivacités pareilles… C’est égal ! je serais curieuse de voir son intérieur maintenant que je ne suis plus là pour tout mettre en ordre. Ce doit être un beau gâchis. À moins que… Oh ! non, ce n’est pas possible. On ne retrouve pas tous les jours une grande sotte comme moi… D’ailleurs il est bien clair qu’il s’ennuyait, puisqu’il a été obligé d’aller passer deux mois à… à… comment donc appelle-t-il ce pays-là ?…

Elle tira tranquillement de sa poche la lettre qu’elle disait avoir perdue et lacérée, et chercha le nom qu’elle voulait :

— Ah ! oui… c’est aux eaux de Royat qu’il est allé… Quelle folie ! c’est tout ce qu’il y a de plus mauvais pour lui, ces eaux minérales… Après tout, qu’il fasse ce qu’il voudra ; cela ne me regarde plus.