Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/142

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leurs petites fenêtres la vision d’une terrasse bordée d’orangers en boule, où la famille Autheman prenait le frais sur des fauteuils américains ; et plus loin, des écuries de briques rouges, des serres vitrées, le potager divisé en deux par la voie ferrée, tout en longueur comme un jardin de chef de gare.

Lorsqu’à la mort de sa belle-mère, Jeanne Autheman se trouva maîtresse de la fortune et de la volonté de son mari, elle fut retenue à Petit-Port par les souvenirs calvinistes, une prédestination pour son œuvre. Elle transforma la maison de campagne comme celle de Paris, rétablit l’ancien temple, construisit des écoles pour filles et garçons, et, les ouvriers affineurs s’en allant avec l’oncle Becker à l’usine de Romainville, il ne resta à Petit-Port que des paysans, maraîchers, vignerons, et les quelques fournisseurs d’un petit pays. C’est parmi ces derniers que Jeanne, secondée par Anne de Beuil, exerça son prosélytisme. La vieille fille allait de porte en porte, promettant la clientèle ou la protection du château à tous ceux qui viendraient au temple, enverraient leurs enfants aux écoles évangéliques, écoles gratuites, annexées d’ouvroirs,