Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/194

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Une porte s’ouvrit. Sa mère rentrait. Elle cacha la lettre dans sa poche, sachant ce qu’en penserait Mme Ebsen. Pourquoi discuter, quand on ne peut s’entendre ? Comment avouer que sans avoir, hélas ! dépassé la terre, elle comprenait maintenant qu’il y eût un devoir plus haut, plus près du ciel que celui de la famille, et que ces blasphèmes ne l’indignaient plus ?

« Te voilà, Linette ?… Je ne t’avais pas vue… J’étais en bas avec Sylvanire… Y a-t-il longtemps que tu es là ?… mais défais-toi donc… »

Éline paraissait si lasse, si épuisée, comme chaque fois qu’elle revenait de Port-Sauveur ; elle se débarrassait de son chapeau avec tant de nonchalance, sans même un coup d’œil à la glace pour voir si elle n’était pas décoiffée, et à table elle mangeait si peu, distraite, répondant à peine aux tendres encouragements de sa mère, que celle-ci commença à s’inquiéter.

Comme toujours en été, elles dînaient, la fenêtre ouverte sur le jardin, et l’on entendait des cris, des rires, mêlés à ces gazouillements éperdus que les oiseaux jettent en adieu au soleil couchant.

« Tiens ! M. Aussandon a ses petits-enfants