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Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/308

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la mère qui guettait à sa vitre ce que la religion pourrait bien faire pour celle à qui la religion avait tout pris.

Elle s’aperçut vite que celui-là aussi l’abandonnait et ne s’en étonna pas, tous ses amis agissant de même. La peur lui enlevait les uns ; la pitié les autres, parce qu’ils ne pouvaient rien pour elle et souffraient de son chagrin inutilement. Sans compter les sceptiques à qui cette aventure d’Anne Radcliffe paraissait improbable dans la lumière du Paris moderne et qui hochaient la tête, presque soupçonneux : « Qui sait ce que cache tout cela ! »

Oui, Paris est lumineux, remué de progrès et d’idées généreuses, mais bien léger, bien en surface. Les aventures s’y précipitent sur une lame courte et brusque comme celle de la Méditerranée, recouvrant la lame suivante de débris aussitôt submergés. Rien de profond, rien de durable. « Pauvre madame Ebsen !… Ah ! c’est affreux… » Mais l’incendie des magasins de l’Univers, la femme coupée en morceaux et retrouvée dans un numéro du Temps où elle tenait à l’aise, le suicide des deux petites Cazarès avaient vite des droits plus récents à la compassion. La seule