Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/366

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de ses yeux, dans le retirement instinctif de tout son être. Doucement, elle le rappelle au sentiment chrétien, à la foi apaisante, à la loi de Dieu qui nous défend d’attenter à nos jours.

« Dieu !… Mais c’est toi mon Dieu… »

Et avec des baisers plutôt que des mots, un bégaiement pasionné :

« Dieu !… c’est ta bouche, ton haleine, tes bras qui m’enlaçaient, ton épaule nue où j’ai dormi… Dans ce temple où tu m’as conduit, sur ces chiffres où mes yeux se brûlent, je n’ai jamais pensé qu’à toi. Tu étais mon courage au travail, ma ferveur à la prière. Maintenant tu t’es reprise… Comment veux-tu que je croie ?… Comment veux-tu que je vive ?… »

Elle se dresse, indignée qu’on ose ainsi blasphémer devant elle. Une rougeur monte à ses joues, le feu de cette colère sainte que permet l’Écriture… Courroucez-vous et ne péchez point.

« Assez, plus un mot… Je croyais que vous m’aviez comprise… Dieu et mon œuvre !… Le reste n’existe plus pour moi… »

Elle est belle ainsi, toute frémissante, elle qui ne s’émeut jamais, et des brindilles pâles de