Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/113

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et aurait laissé lire dans son jeu. On sait que la bataille eut deux épisodes successifs et que d’abord on la crut perdue. Les premières nouvelles arrivées à Paris avaient été expédiées avant qu’elle eût été reprise et gagnée. Elles la représentaient comme une défaite pour les armées républicaines. C’est alors que Fouché aurait levé le masque et se serait décidé à exécuter ses desseins. Puis, des avis ultérieurs lui ayant appris la victoire de Bonaparte, il s’était hâté de retirer ses ordres, d’en faire disparaître les preuves, ainsi que toute trace du complot. Mais, malgré ses efforts, il n’avait pu les détruire toutes. Des pièces écrites et signées, attestant sa trahison, étaient restées au pouvoir de Clément de Ris, à qui il les avait confiées, et c’est parce que celui-ci refusait de les restituer qu’à l’effet de les lui reprendre, Fouché avait simulé l’attentat du 23 septembre. Voilà ce que racontaient ses ennemis.

Notons en passant que Bonaparte ne paraît pas avoir ajouté foi à ces dires. S’il les eût considérés comme l’expression de la vérité, il n’eût pas maintenu Fouché au ministère de la Police. De plus, nulle part n’apparaît la preuve de la culpabilité de Fouché en cette circonstance. Les allusions qu’y ont faites depuis Savary dans ses Mémoires et la duchesse d’Abrantès dans les siens ne sont qu’un écho de ce qui se disait alors, et ne constituent pas une preuve. Ce ne sont pas non plus des preuves que les affirmations de l’historien Crétineau-Joly et l’opinion qu’il exprime à propos de ces faits obscurs. Il parle bien de pièces authentiques accablantes pour Fouché et qu’il affirme avoir tenues et lues. Mais il n’en cite aucune. Au surplus, il est bien difficile de comprendre pourquoi le ministre de la Police, à supposer qu’il eût entrepris de tirer parti, au profit de ses ambitions, de la prétendue défaite de Bonaparte, aurait