Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/128

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renouvela. Fouché fit la sourde oreille. Il continua à diriger l’instruction. On ne relève la signature d’Abrial qu’au bas de ses doléances et de la loi qui, le 7 février, créa dans l’Indre-et-Loire, à l’effet de juger les coupables, un tribunal spécial. À ce moment, on ne les tenait pas encore. Au lendemain de l’événement, on avait emprisonné deux propriétaires de Touraine, MM. Cazenac de Castres et Mounet. Ils purent établir qu’ils étaient étrangers à l’attentat. Un excès de précautions les fit garder en prison durant plusieurs mois, malgré les démarches de M. Clément de Ris, qui les savait innocents. Mais on cherchait d’un autre côté.

La police fut soudain tirée de ses perplexités par un sieur Charles Gondé, de Romorantin, personnage méprisable, appartenant à la lie du parti royaliste, mêlé à l’affaire, et qui, pour prix de ses dénonciations, obtint sa grâce. Il dénonça comme principaux coupables le marquis Dumoustier de Canchy, habitant Chartres, le beau-frère de ce dernier, comte de Mauduisson, établi à Nogent-le-Rotrou, un ancien officier nommé Renard, et Gaudin, dit Monte-au-Ciel, précédemment condamné à mort comme voleur de grand chemin. Des pièces de police incomplètes et obscures, il ressort qu’au dire de Gondé il y avait eu accord entre ces divers personnages pour se procurer, coûte que coûte, des ressources en vue de rallumer la guerre civile. Les noms de quelques riches propriétaires tourangeaux auraient été mis dans un chapeau, et le sort aurait désigné M. Clément de Ris aux premières tentatives des inventeurs de ce système de brigandage. Peu de jours avant l’enlèvement, ils étaient venus, sous prétexte de se baigner dans le Cher, reconnaître les bois où ils devaient opérer. Ils avaient eu pour complices un ancien émigré, Pierre Aubereau, d’Orléans, M. et Mme Lacroix, propriétaires du château