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L’AFFAIRE D’ACHÉ-DE COMBRAY

I

En l’année 1806, il s’en fallait que l’admirable machine gouvernementale édifiée par Bonaparte fonctionnât sur toute l’étendue du territoire français avec une égale régularité. Dans le département du Calvados, en particulier, son fonctionnement trahissait des rouages défectueux. Ce n’est pas le préfet de Caen, M. Caffarelli, qui eût pu leur imprimer une marche énergique. Un brave homme, ce préfet, animé d’intentions pures et honnêtes, rempli de droiture et de loyauté[1], mais trop timide et trop indécis pour faire respecter l’autorité impériale dans des contrées naguère encore livrées aux influences royalistes. Jadis chanoine du chapitre de Toul, défroqué sous la Révolution, suspect de modérantisme sous la Terreur et plusieurs fois menacé de la guillotine, il conservait de son long contact avec le monde ecclésiastique des manières affables et bienveillantes, révélatrices d’un esprit crédule et sans défiance, incompatibles avec les rigueurs qu’eussent nécessitées les

  1. Un de ses frères était évêque de Saint-Brieuc, l’autre général aide de camp de l’Empereur. Napoléon disait d’eux : « Ces Caffarelli sont des fanatiques d’honneur. »