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Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/223

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voiturier. À eux deux, ils constituaient la garde du convoi. Aposté avec ses hommes dans les profondeurs du bois, Antonio vit venir de loin le lourd équipage, que traînaient quatre chevaux. À leur tête marchait le conducteur Grousset ; derrière, venait le gendarme entouré de trois piétons trouvés en chemin. Ces gens étaient sans défiance. Ils avaient laissé la charrette prendre sur eux une assez grande avance. C’est de loin qu’ils virent, au moment où elle s’engageait sous bois, plusieurs individus armés surgir d’un fourré, arrêter les chevaux et s’emparer du conducteur dont ils eurent vite bandé les yeux. Le gendarme s’élança le sabre à la main, en criant à ses compagnons qui s’enfuyaient d’aller au plus prochain village querir la force armée et faire sonner le tocsin. Mais quand il arriva à l’entrée du bois, la charrette n’y était plus. Les brigands l’avaient entraînée sous un chemin couvert, et avec elle Grousset. Tandis que plusieurs d’entre eux déchargeaient les caisses, les autres, cachés derrière les arbres, tiraient sur le gendarme pour l’empêcher d’avancer. Une balle lui fracassa le bras. Réduit à l’impuissance d’attaquer et de se défendre, il dut chercher son salut dans la fuite.

Pendant ce temps, les bandits brisaient, à coups de hache, les caisses éparses dans l’herbe, en tiraient l’argent qu’ils versaient dans des sacs dont ils s’étaient munis et qu’avait cousus de ses blanches mains Mme Aquet de Férolles, s’emparaient de soixante mille francs en écus et les chargeaient sur trois des chevaux détachés de la voiture. Considérée par eux comme trop lourde et trop encombrante, une somme de trois mille francs en monnaie de billon fut abandonnée. Cependant, l’opération à laquelle ils se livraient aussi activement qu’ils le pouvaient avait duré assez de temps pour permettre