Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/271

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la marquise, sa fille, le notaire et la bande qui avait opéré dans le bois du Quesnai. Démesurément long, aussi long que diffus, l’acte d’accusation s’appliquait à déterminer les responsabilités de chacun. Le lecteur étant maintenant en mesure de les déterminer lui-même, il convient de lui épargner la lecture de ce document qui ne lui apprendrait rien qu’il ne sache déjà. Il n’y a lieu d’en retenir que la conclusion. Elle présente un curieux spécimen du langage judiciaire qu’on parlait en 1808 dans l’une des principales cours de l’Empire : « Ainsi que les éléments du crime, disait le procureur général en finissant, les artisans de la machination sont donc à découvert. On voit le monstrueux assemblage des débris de la faction en contact avec les amorces de la rapine. On voit sur la même ligne du forfait deux chefs révoltés qui donnent le signal du pillage des deniers publics, une bande de farouches stipendiaires qui l’effectuent au prix de l’assassinat et une bande non moins coupable qui prodigue ses manœuvres à l’assistance du crime et au partage du butin. Enfin, pour nœud qui rassemble ces atroces catégories, on découvre avec horreur, malgré leur impuissance, les vestiges de l’esprit du désordre aiguisant les poignards du brigandage. » C’est au son de cette musique que le ministère public allait arracher aux juges dix condamnations capitales.

Jusqu’à la veille du procès, toutes les influences dont disposait la famille de Combray s’exercèrent à Paris pour épargner à la marquise, sinon à Mme Aquet de Férolles, la douleur et la honte d’une comparution devant les juges. C’était sa fille aînée, demeurée étrangère à ces tristes événements, qui avait organisé et menait cette campagne. Fouché et Réal restèrent inexorables. Ils ne se laissèrent toucher ni par le grand âge de l’accusée,