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Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/298

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quelques-uns des émigrés et des chouans établis à Jersey, entre autres Louis-Armand de Chateaubriand, cousin de l’auteur d’Atala, qui s’était marié avec une jeune femme de Saint-Hélier, Rachel Braun, après avoir guerroyé dans l’armée de Condé ; le comte de Goyon-Vaucouleurs, ancien officier de marine, de la famille des Goyon, illustre dans les pays bretons ; Bertin, Ferdinand de Grammont, Lenoir, Prijent, Bouchard, obscurs combattants des guerres vendéennes, jetés après d’innombrables aventures dans une vie d’intrigues ténébreuses et d’incessants dangers.

Le 29 août 1806, l’un des espions que la police française entretenait à Hambourg adressait à Fouché, dans un rapport confidentiel, quelques détails sur l’agence de Jersey. « Après avoir été pendant un temps considérable, disait-il, confiée à un sieur Prijent, fils d’une fruitière de Saint-Malo qui a fait deux cents et quelques atterrages et a même obtenu la croix de Saint-Louis par ses bons et loyaux services, elle est entre les mains d’un nommé Bertin. »

L’espion se trompait. Bertin, qu’il désignait comme l’émissaire du prince de Bouillon, avait dès cette époque quitté Jersey pour passer dans le Morbihan. Il faisait partie de la bande du chevalier de La Haye Saint-Hilaire avec lequel, à quelques semaines de là, il allait être pris et fusillé comme l’un des auteurs de l’enlèvement de l’évêque de Vannes. Quant à Prijent, il continuait, de concert avec Bouchard, à porter en Bretagne les ordres du comte de Puisaye, à l’aide de petits navires que commandaient tour à tour le comte de Goyon et Armand de Chateaubriand. C’était là, semble-t-il, une bien humble besogne pour deux nobles gentilshommes dont l’un, Goyon, avait dépassé la cinquantaine, et dont l’autre, Chateaubriand, n’en était pas loin. Mais ils ne