Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/53

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rection en Bretagne, muni d’argent, grâce aux Anglais, chargé en un mot de préparer le soulèvement et de le diriger. Prêts à lui fournir subsides et secours, des navires britanniques louvoyaient en vue des côtes bretonnes, et le but des conspirateurs était d’une part une descente à Brest et d’autre part un attentat contre Bonaparte.

Cet état de choses commandait des mesures énergiques. « Poursuivez les chouans, écrivait Fouché le 23 juin, aux autorités du Morbihan. Fusillez-les sans pitié. Le premier Consul est vainqueur à Marengo. Il faut qu’il le soit partout. » Ou encore : « N’épargnez aucun des chefs. Nos agents commencent à être connus et compromis, j’en mettrai d’autres, et de meilleure qualité à votre disposition. Ce sont des gentilshommes, des ci-devant qui, par leurs noms et leurs titres, sont estimés de tous les chouans. »

Par malheur, si rigoureux que fussent ces ordres, il était plus facile de les écrire que de les exécuter. Les chouans se dérobaient à toutes les recherches, ne se trahissaient que par la violence et la soudaineté des actes. Cadoudal, Mercier la Vendée, son principal lieutenant, ses officiers et ses confidents restaient introuvables.

En même temps, – c’était en novembre, – commençait dans le Morbihan une longue série de méfaits. Le 19 de ce mois, l’évêque constitutionnel de Quimper, Audrein, était assassiné aux portes de la ville par une bande de chouans, dans des circonstances abominables. En quelques semaines, une quinzaine de personnes, gendarmes, propriétaires, paysans, des femmes même, périssaient de la main des royalistes, pendus, fusillés, poignardés, et les assassins signaient en quelque sorte leur crime en des inscriptions attachées aux cadavres