Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/72

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ce moment, elle eut à sa disposition un personnel actif et grassement payé, qui la tenait au courant des faits et gestes des royalistes et de leurs projets. Il arriva même que les hommes les plus éminents du parti, pour gagner la confiance du pouvoir auquel ils demandaient le droit de rester en France ou la restitution de leurs biens confisqués, se prêtèrent à des entretiens au cours desquels, habilement interrogés par Réal ou par Desmarets, ils se laissaient aller, sans en comprendre la gravité, à des révélations compromettantes.

Peu de temps avant que la police ne découvrît la conspiration de Georges, et quand déjà sa surveillance s’éveillait à la suite de faits qu’elle considérait comme symptomatiques, c’est à des entretiens de ce genre qu’elle devait de recueillir diverses indications propres à confirmer ses premiers soupçons. On lit, à cette date, dans un rapport de Réal : « Hier encore, dans un entretien avec un chef principal de la Bretagne, comme nous discutions sur de certains individus, il me demanda si j’avais les yeux ouverts sur d’Hozier et qu’il importait de ne pas le perdre de vue. » Charles d’Hozier était un des agents de Georges. Installé à Paris après l’amnistie, il y dirigeait en apparence une entreprise de voitures publiques. En réalité, il s’y consacrait à préparer voies et moyens en vue de l’arrivée prochaine du terrible chouan dont il connaissait déjà les projets. La police ne le savait pas encore de connivence avec les rebelles. Ce fut, comme le révèle le rapport de Réal qui vient d’être cité, l’avertissement d’un chef breton qui la mit en défiance et lui fit ouvrir l’œil. Il n’est que trop vrai qu’en plusieurs circonstances, elle fut prévenue de même par les propos inconsidérés de quelques personnages trop bavards, victimes de leur crédulité et de la bonne grâce qu’en s’entretenant avec eux leur témoignait Réal,