Page:Daudet - Numa Roumestan, Charpentier, 1881.djvu/265

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tout bas : « Il va venir me prendre… Chut !… dites rien ! » Cela lui parut bien prompt, bien hardi, surtout la pensée d’introduire ce jeune homme chez ses parents. Mais la paysanne voulait précipiter les choses. Et tout de suite Hortense comprit son erreur, à l’aspect de ce cabotin rejetant ses cheveux en arrière, d’un mouvement inspiré, cassant et déplaçant le sombrero provençal sur sa tête à caractère, toujours beau, mais avec une préoccupation visible de le paraître.

Au lieu de s’humilier un peu, de se faire pardonner l’élan généreux qu’on avait eu vers lui, il gardait l’air vainqueur et fat de la conquête, et, sans parler, – car il n’aurait trop su quoi dire –, il traita la fine Parisienne comme il eût traité celle des Combettes en pareil cas, la prit par la taille d’un geste de soldat troubadour et voulut l’attirer à lui. Elle se dégagea avec une détente répulsive de tous ses nerfs, le laissant effaré et niais, pendant qu’Audiberte intervenait vite et grondait son frère très fort. Qu’est-ce que c’était que ces manières ? C’est à Paris qu’il les avait apprises, au faubourg de Saint-Germeïn sans doute, auprès de ses duchesses ?

— Attends au moins qu’elle soit ta femme, allons !

Et à Hortense :

— Il vous aime tant… Il se calcine le sang, pécaïré !

Dès lors, quand Valmajour vint chercher sa sœur, il crut devoir prendre l’allure sombre et fatale d’une vignette de scène musicale, la mer m’attend, le