Page:Daudet - Port-Tarascon, 1890.djvu/293

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là-bas, dans la nuit, comme les bûchers qu’on allume pour la Saint-Jean. Évidemment, c’est un signal.

Tartarin, avec qui j’ai pu échanger deux mots à l’instruction dans le couloir du juge, a vu comme moi ces feux à travers les barreaux de sa geôle, et quand je lui ai dit ce que j’en pensais, que des amis voulaient peut-être le faire évader comme Napoléon à Sainte-Hélène, il a paru très frappé de ce rapprochement.

« Ah ! vraiment, Napoléon à Sainte-Hélène…, on a essayé de le sauver ? »

Mais, après un moment de réflexion, il m’a déclaré qu’il n’y consentirait jamais.

« Certes, ce n’est pas la descente des trois cents pieds de la tour sur une échelle de corde, secouée la nuit par le vent du Rhône, qui me ferait peur. Non, ne croyez pas cela, enfant !… Ce que je redouterais le plus, c’est que j’aurais l’air de fuir l’accusation : Tartarin de Tarascon ne s’évadera pas. »

Ah ! si tous ceux qui hurlent sur son passage : « Au Rhône ! Zou ! au Rhône ! » avaient pu l’entendre !… Et on l’accuse d’escroquerie ! On a pu le croire complice de ce