Page:Daudet - Port-Tarascon, 1890.djvu/300

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Le mois d’août à Tarascon, je vous dirai, est le mois de la lourde chaleur. Il y fait chaud comme en Algérie, et les précautions contre l’ardeur du ciel sont les mêmes que dans nos villes d’Afrique : la retraite dans les rues avant midi, les casernes consignées, les auvents mis à toutes les boutiques. Mais le procès de Tartarin avait changé ces habitudes locales, et l’on imagine aisément la température que devait atteindre cette salle d’audience bondée de monde, avec les dames à falbalas et à panaches empilées sur les tribunes du fond.

Deux heures sonnaient au jaquemart du palais ; et par les hautes fenêtres larges ouvertes, devant lesquelles descendaient de longs rideaux jaunes formant stores, entrait, avec les battements de la lumière réverbérée, le bruit assourdissant des cigales sur les alisiers et les platanes du Cours, — gros arbres à feuilles blanches, à feuilles de poussière, — les rumeurs de la foule restée dehors, les cris des marchands d’eau, comme aux arènes les jours de courses : « Qui veut boire ? L’eau est fraîche !… »

Vraiment il fallait être de Tarascon pour résister à la chaleur qu’il faisait là-dedans,