Page:Daudet - Souvenirs d’un homme de lettres, 1889.djvu/144

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dins, il y avait en somme une grande indifférence de la salle. Le public parisien, bien moins monarchiste que moi, restait profondément insensible à des misères royales ; c’était trop en dehors des conventions habituelles, aussi loin de sa pitié que les incendiés de Chicago et les inondés du Mississipi.

À part quelques feuilletons d’indépendants tels que Geffroy, Durranc, la critique suivit le public, c’est son rôle aujourd’hui ; et la pièce eut le bénéfice d’un universel éreintement. Quoique seul Paul Delair parût en nom sur l’affiche, ce fut moi surtout qui restai plusieurs semaines en butte aux calomnies, aux outrages de toutes sortes. Je fais de ces injures le cas qu’elles méritent. Par la multiplicité des journaux et la clameur des reportages, la voix de Paris est devenue un écho assourdissant de montagne, qui décuple le bruit des causeries, répercute tout à l’infini, étouffe, en l’élargissant, le ton juste du blâme et de l’éloge. Pourtant j’ai noté une de ces calomnies que je veux relever. On a prétendu que mon livre était une flatterie au