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marins, à propos d’un casier de homards, d’une distribution de part de pêche, voici M. le curé passé juge de paix. Qu’on fasse un peu trop de tapage à l’auberge le dimanche soir, vite il roule une écharpe sur sa soutane, et remplit à l’occasion les fonctions de garde champêtre.

Il n’y a pas longtemps même, il descendait à des emplois encore plus infimes. Il avait le monopole des boissons et les faisait distribuer par une sœur à travers un guichet. Il avait aussi la clef du four banal où chacun vient cuire son pain. C’étaient là des précautions d’exil, la réglementation des vivres de mer introduite sur cette île livrée au hasard des flots comme un navire.

Depuis trois ou quatre ans, les antiques usages se sont un peu modifiés ; mais le principe en est toujours vivant, et le curé actuel de l’île, un homme intelligent et vigoureux, nous paraît de force à faire respecter son autorité multiple. Il habite, près de l’église, un modeste presbytère, que deux peupliers, un figuier superbe, un