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Page:Daudet - Trente ans de Paris, Flammarion, 1889.djvu/156

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qu’il m’en veut toujours, que mes livres sont chassés de ses librairies, introuvables même à la gare, et du plus loin que j’aperçois dans l’embrasure du wagon le château du bon roi René, je me sens mal à l’aise et voudrais brûler la station. Voilà pourquoi je profite de cette édition nouvelle pour offrir publiquement aux Tarasconais, avec toutes mes excuses, l’explication que l’ancien commandant en chef de leur milice était venu me demander.

Tarascon n’a été pour moi qu’un pseudonyme ramassé sur la voie de Paris à Marseille, parce qu’il ronflait bien dans l’accent du Midi et triomphait, à l’appel des stations, comme un cri de guerrier Apache. En réalité, le pays de Tartarin et des chasseurs de casquettes est un peu plus loin, à cinq ou six lieues, « de l’autre main » du Rhône. C’est là que, tout enfant, j’ai vu languir le baobab dans son petit pot à réséda, image de mon héros à l’étroit dans sa petite ville, là que les Rebuffa chantaient le duo de Robert-le-Diable ; c’est de là, enfin, qu’un jour de novembre 1861, Tartarin et moi, armés