Page:Daveluy - À l'école des héros, 1931.djvu/157

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Kinaetenon l’avait, chaque fois deviné et retenu d’une main de fer… et cela si adroitement que leur visiteur ne s’était même pas douté de cette lutte dans l’ombre.

Kinaetenon écouta la voix glapissante de son camarade, longtemps, sans l’interrompre. Celui-ci racontait la division qui existait dans le canton, au sujet du Père Jogues. Les familles du Loup et de La Tortue voulaient sauver les prisonniers, invoquant le récent traité de paix aux Trois-Rivières. La famille de l’Ours n’en voulait rien entendre et réclamait la mort, avec des cris, des injures et un tintamarre horrible.

Enfin, pour ne pas que la guerre éclatât entre les trois familles, un ancien avait proposé de remettre le sort des prisonniers blancs, car le Père avait un compagnon[1] avec lui, entre les mains d’une assemblée générale composée des anciens et des capitaines du canton. Cette assemblée se réunissait à Tionnontogen, dès le surlendemain, le 18 octobre.

— À Tionnontogen, dis-tu, mon frère ? » demanda rêveusement Kinaetenon. Il s’amusait depuis quelques instants à faire, défaire et refaire quelques nœuds dans une corde qu’il tenait à la main. Soudain, en un geste rapide, il passa cette corde au cou de Charlot, puis, prenant son fouet, il le fit cingler non loin des oreilles de ce dernier.

  1. Jean de la Lande, natif de Dieppe, un donné des Pères Jésuites